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La grande déprime
27 juillet 2011

Chapitre un

-    Putain, ça ne va pas être facile !

C’était un peu le cri du cœur de Nicolas Rossignol vers son patron. Jean-François Copé plissa des yeux, se toucha le menton presque subrepticement, puis saisit la télécommande pour éteindre l’immense télévision à écran plat de son bureau.

L’éternel chef de file des députés de droite prit une voix grave.

-    Il a été très bon, il faut l’admettre… Pour son jeune âge, il est très calme, très posé, plus que son père au même âge…

Il se leva, marcha doucement en tournant le dos à sa petite bande de fidèles.

-    Il a un discours un peu social, il faudrait se démarquer de son image presque centriste.

Jérôme Lavrilleux se leva à son tour en s’exclamant :

-    On a qu’à l’attaquer sur sa droite en inventant une nouvelle loi sur l’immigration ?

Au hochement de tête, même de dos, l’assemblée comprit que Jean-François Copé était dubitatif.

-    Non, non. Depuis que son père lui a refilé Guéant et Hortefeux à son cab, ce petit con est paré à droite. Guéant s’apprête même à proposer une loi obligeant les travailleurs immigrés à rejoindre un camp fermé après leur travail. J’ai déjeuné avec Marine et Zemmour hier midi et même eux ne savent pas quoi faire. Impossible de surenchérir là-dessus.

Ce fut au tour de Nicolas Rossignol de se lever et de rejoindre son patron.

-    Il fait vraiment chier Guéant. Il devrait être à la retraite ! En plus, depuis que sa loi sur la suppression du regroupement familial est passée, il ne se sent plus pisser.

-    Et si on l’attaquait sur le pédé qui l’accompagne partout et qui s’occupe de sa communication ?  lança Jacques Myard, l’indéboulonnable député-maire de Maisons-Laffitte qui semblait se réveiller d’un somme, les mains posées sur son ventre replet.

Nicolas Rossignol regarda Myard avec un air de dédain :

-    Ne dites pas n’importe quoi ! Des pédés dans la com, c’est comme dans la mode ou la télé, il y en a plein. Et en plus, c’est risquer un procès en diffamation.

Ces deux-là ne s’aimaient guère et cela se voyait tout de suite.

Jacques Myard se renfrogna :

-    Oh, je disais ça pour aider à trouver des pistes, c’est tout !

Jean-François Copé se sentit obligé d’intervenir :

-    Je me méfie beaucoup de l’électorat pédé, surtout dans les grandes villes. Je ne peux pas me permettre de me le foutre à dos.

Myard éclata de rire.

-    Attention de ne pas trop te les mettre à dos… Ah, ah, ah…

-    T’es lourd, Jacques ! Cingla Copé avant de reprendre.

-    Sérieusement, les gays c’est un peu comme les chasseurs de l’époque Mittérand ou Chirac.

-    Sauf que les chasseurs ne représentent plus rien… dit Myard avec un air sérieux, essayant de rattraper le coup en se faisant passer pour un fin analyste politique.

Jean-François Copé se tourna vers Jérôme Lavrilleux.

-    Jérôme, on va faire comme le fils Sarko. Il faut que tu me trouves un pédé à mettre dans l’équipe de campagne. Même une folle, ce n’est pas grave, c’est juste pour quelques mois. Il faudrait même qu’il soit assez voyant. Il n’y en avait pas un dans les employés des parcs et jardins de Meaux ? Tu demanderas à Nelle Peveri.

Jérôme Lavrilleux sembla réfléchir un instant.

-    Et une lesbienne ?

-    Bof ! C’est moins voyant, non ?

-    Celle-là, c’est une ancienne sportive de haut niveau. Et elle vous a toujours soutenu.

-    Ah, bien… fit Copé visiblement peu séduit par la proposition de son directeur de campagne. Elle est d’où ?

-    De Saint-Quentin.

-    J’espère que ce n’est pas un sous-marin du gros Bertrand ?

-    Non, non. Elle était plutôt de gauche avant.

Jean-François Copé regarda toute son équipe et dit en souriant :

-    C’est pour ça que j’ai toujours préféré les sportifs aux artistes. Même gays ou lesbiennes, les sportifs finissent toujours à droite, alors que les artistes restent d’invétérés gauchistes toute leur vie. C’est parce que les sportifs ont le goût de l’effort. Et l’effort, c’est de droite ! La gauche, c’est l’assistanat, le RSA et la flemme…

L’assistance se regarda bouche bée par la justesse du propos. Ils faillirent presque applaudir leur champion, mais se ravisèrent car Jean-François Copé n’aimait pas les flagorneurs.

©Butin Rabussy 2011

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